Dans la promotion de la culture de la vie, il est fondamental de ne pas abandonner la bataille de l’opinion publique.
Cela s’est vérifié aux Etats-Unis : bien que les médias les plus importants y soient pro choice (« pour le choix », c’est-à-dire en faveur de l’avortement), les pro life (« pour la vie ») ont réussi à entretenir le débat social jusqu’à obtenir un soutien majoritaire dans l’opinion publique.
Avec une majorité de médias pro choice, 48% de la population des États-Unis se déclare pro life, face à 45% qui se déclarent en faveur de l’avortement, d’après l’enquête Gallup réalisée en mai 2013. Il a fallu quarante ans pour obtenir ce revirement de l’opinion publique, depuis que le Tribunal Suprême a éliminé les restrictions à l’avortement en 1973. Cela n’a été possible que grâce au dynamisme de la société nord-américaine.
Avec ce panorama, comment communiquer la culture de la vie de façon efficace ? María Martínez Orbegozo propose six clés, qui tiennent compte des années de pratique de l’avortement dans la société occidentale et des différentes campagnes réalisées autour du sujet.
Communication positive
Dans des enquêtes réalisées auprès de femmes en âge de procréer et susceptibles d’affronter des situations induisant à avorter, on a constaté que les campagnes pro life négatives (par exemple, des photos de fœtus avortés) provoquaient un rejet. Il n’en va pas de même avec d’autres types de campagnes centrant leur message sur la femme, sur la valeur positive de la maternité, sur des clips mettant en scène des filles courageuses qui décident de garder leur enfant…
« Les messages positifs t’inclinent à dire “oui” à ce qu’on te propose », signale María Martínez Orbegozo. Elle ajoute que les manifestations pro life produisent le même effet : on y voit de la joie, des familles, on y entend de la musique ; tout le contraire de l’attitude de féministes radicales qui manifestent de façon violente, en proférant des insultes et en posant des gestes grossiers.
Se mettre à la place de la femme enceinte
« Il est vrai que nous avons fait peu pour accompagner convenablement les femmes qui se trouvent dans des situations très dures où l’avortement leur est présenté comme une solution rapide à leurs profondes angoisses, et particulièrement quand la vie qu’elles portent résulte d’un viol ou se présente dans un contexte d’extrême pauvreté. “Qui pourrait ne pas comprendre ces situations si douloureuses ?”» souligne le pape François dans Evangelii gaudium (n. 214) ».
María Martínez Orbegozo cite cette phrase du pape et ajoute : « Une mère qui voit dans l’avortement la seule issue à sa détresse n’est pas une mère qui veut tuer son enfant ; c’est une femme qui a beaucoup de problèmes ». Pour défendre cette idée, elle s’appuie sur son expérience : durant les mois où elle a travaillé à Expectant Mother Care (New York), elle a pu s’occuper de plus de 140 femmes vivant une grossesse non planifiée et exposées au risque d’avortement. « Il y avait des situations très dures : la majorité de ces femmes étaient sans ressources économiques, beaucoup étaient menacées par leur partenaire ou leur famille… Il faut se mettre dans la peau de ces personnes pour qui l’avortement représente la seule issue, car c’est la seule option que lui offre la société » a souligné la Directrice de Culture de la Vie.
Il s’agit de centrer le travail pro life sur l’aide aux mères, d’être à leur côté, de leur demander ce dont elles ont besoin. Beaucoup d’associations fonctionnent avec cette approche.
La femme, victime de l’avortement
« Pendant beaucoup d’années, nous avons mis l’accent sur l’enfant, chose nécessaire car il est la première victime de l’avortement, mais en oubliant l’autre victime : la mère qui se trouve dans une situation à risque », ajoute María Martínez Orbegozo.
Il s’agit d’aborder le débat sur l’avortement à partir de la réalité des années passées sous un régime d’avortement légalisé en Europe. Il y a de nombreuses histoires à raconter. Beaucoup des femmes qui ont avorté se sentent libérées en racontant leur expérience car elles en aident d’autres à ne pas commettre la même erreur. Avec leurs histoires, on peut montrer ce qui s’est passé durant ces années de pratique de l’avortement légal, ce que cela a supposé réellement pour la femme et pour la société.
En étudiant la sociologie de l’avortement, on découvre que c’est une forme de violence envers la femme, et que ce que l’on a prétendu nous vendre comme un droit de la femme en a fait des victimes.
S’allier à la science
« Nous devons mettre à profit ce qui s’est converti en l’un des meilleurs alliés de la culture de la vie : la science et la technique » ; les progrès en embryologie et les nouvelles techniques d’échographie qui montrent de façon chaque fois plus nette le bébé dans le ventre de sa mère.
María Martínez Orbegozo raconte comment, aux Etats-Unis, on offre habituellement des échographies gratuites aux mères qui songent à l’avortement : « Un bon nombre d’entre elles, en voyant le bébé sur l’écran et en entendant les battements de son cœur, se rendent compte que ce qu’elles portent en elles est leur enfant et elles décident de poursuivre la grossesse. »
María Martínez Orbegozo insiste sur l’importance, pour les personnes impliquées dans le mouvement pro life, de se forger une très bonne formation dans les aspects scientifiques de la question.
Unis vers un objectif commun
Abby Johnson a été directrice d’une clinique de Planned Parenthood, une des plus grandes organisations des Etats-Unis en faveur de l’avortement. Quand elle a changé d’idée et s’est engagée dans le mouvement pro life, elle a indiqué que le mouvement pro choice travaillait très bien et était très efficace car ses membres ne passaient pas leur temps à discuter entre eux mais avaient un même objectif : le combat pour obtenir l’avortement libre, dans lequel ils unissaient tous leurs efforts.
Se centrer sur la famille, pas sur la religion
A l’heure de débattre sur l’avortement, il est préférable de se passer des arguments religieux puisqu’il y a suffisamment de raisons scientifiques et philosophiques pour défendre la position pro life. On évite ainsi de voir ses arguments étiquetés de « fanatisme religieux » et on montre en même temps que la question de la défense de la vie intéresse toute personne, de toute religion.
« Aux Etats-Unis, centrer la lutte pour la suppression de l’avortement sur un point de vue humain a permis d’unir le mouvement pro life au-delà des différents credo » affirme María Martínez Orbegozo. C’est ainsi que là-bas on peut trouver des associations pro life sous des bannières aussi différentes que les athées pour la vie, les féministes pour la vie ou l’alliance pour la vie des gays et des lesbiennes.
María Martínez Orbegozo est directrice du projet Culture de la Vie et de Arguments. Elle a bâti son expérience dans la collaboration avec des associations pro life en Espagne et aux Etats-Unis. Source : http://www.aceprensa.com/articles/seis-claves-para-comunicar-con-eficacia-la-cultura-de-la-vida. Lucía Martínez Alcalde est licenciée en philosophie, écrivain et journaliste. Cet article a été traduit de l’espagnol par Carine Therer.