Une librairie de référence pour le lecteur chrétien Expédition dans toute la Belgique Papers sur des questions d’actualité
Jesus Christ on cross painting

Douze questions sur Jésus de Nazareth

31 mai 2012

Si Jésus-Christ a vraiment existé, s’il est Dieu, alors tout change. Si, pour moi, il est mort sur la Croix et il est ressuscité, alors je ne peux plus vivre comme avant. Mais ces hypothèses, sont-elles crédibles aujourd’hui.

1. Jésus de Nazareth a-t-il vraiment existé ?

A l’heure actuelle, il n’y a pas de doutes raisonnables sur l’existence historique de Jésus de Nazareth. Des sources non-chrétiennes contemporaines des Évangiles (Flavius Josèphe, Pline le Jeune, Tacite et Suétone) confirment l’existence de Jésus et permettent de le situer chronologiquement et géographiquement : en Judée et sous Ponce Pilate, qui fut préfet de l’année 26 à 36.

2. Jésus n’est-il pas qu’un simple « grand personnage » de l’histoire, qui nous a transmis un message d’amour et de sagesse, au même titre que Socrate, Confucius ou Bouddha ?

Pour les chrétiens, Jésus n’est pas un maître quelconque, un simple prophète ou un messager de Dieu, mais le Rédempteur, le Sauveur de l’humanité. Comme le dit saint Pierre « il n’est de salut en aucun autre, car il n’y a pas sous le ciel d’autre Nom donné aux hommes par lequel nous devions être sauvés » (Ac 4, 12). Et ceci n’est pas le fruit de la présomption : Jésus est le seul personnage de l’histoire qui ait vaincu la mort.

3. Y a-t-il des raisons qui permettent d’affirmer que Jésus est vraiment ressuscité ?

La première raison est le fait d’avoir trouvé son tombeau vide deux jours après qu’il y ait été enseveli, et ce malgré les gardes que les autorités avaient placés près de la sépulture pour éviter le vol du cadavre. Ce fait a été d’emblée proclamé par ses disciples et n’a jamais été contesté par ses ennemis. La deuxième raison, qui est définitive, réside dans les apparitions de Jésus à des centaines de ses disciples dans les jours suivants, d’après les quatre Évangiles et le témoignage de saint Paul (cf. 1 Co 15, 3-7).

4. Mais tout cela nous ne le savons que par le Nouveau Testament, c’est à dire par des sources partielles, voire partisanes. N’y a-t-il pas d’autres arguments ?

Comment les disciples de Jésus furent-ils capables de surmonter la terrible déception face à l’échec apparent de leur maître, condamné à mort par les chefs religieux du peuple ? Tout indique qu’ils n’étaient pas portés à croire en la résurrection : comment alors ont-ils pu déclencher d’un jour à l’autre une « offensive » victorieuse ? Comment l’annonce de la résurrection aurait-elle été possible dans une ville où les responsables de la crucifixion de Jésus, pris à partie par les disciples, n’auraient eu qu’à indiquer le chemin du tombeau pour la réfuter ? Comment aurait pu naître la religion la plus importante du monde à partir d’un prophète qui aurait échoué ? Comment des Juifs, qui ne pouvaient même pas prononcer le nom de Dieu, auraient-ils pu diviniser un autre Juif ? Enfin, comment auraient-ils pu donner leur vie, souvent dans le martyre, pour proclamer la foi si tout cela n’était qu’une fable qu’ils avaient inventée ?

5. La résurrection de Jésus suffit-elle pour croire qu’il est Dieu, comme l’affirment les chrétiens ?

Une autre condition nécessaire, mais pas suffisante, pour croire que Jésus est Dieu, est la conscience que Jésus avait lui-même d’être Dieu. Dans les Évangiles, nous trouvons de nombreuses manifestations de cette conscience : sa réponse affirmative au grand prêtre Caïphe qui l’interrogea sur ce point (cf. Mc 14, 62) ; sa revendication de pardonner les péchés (cf. Lc 5, 17-26) ; sa prétention de corriger par sa propre parole la Loi donnée par Dieu à Moïse (cf. Mt 5, 27-48) ; son affirmation que le salut de l’humanité dépend de sa mort (cf. Mt 26, 28), etc. L’Evangile de saint Jean, aujourd’hui considéré par un certain nombre d’exégètes comme la source historique la plus fiable sur la vie du Christ, est rempli d’affirmations de Jésus sur sa divinité, sur sa prétention à l’égalité avec Dieu.

6. Un homme qui manifeste cette prétention ne fait-il pas preuve de folie ?

Il est vrai que Jésus est le seul parmi les prophètes et les sages de l’histoire à avoir osé se considérer lui-même comme Dieu. Mais d’un autre côté, son enseignement équilibré et profond, ses paraboles — qui continuent à éclairer nos consciences —, sa fréquentation ouverte et miséricordieuse de toute sorte de personnes, son attitude sereine dans les polémiques avec ses opposants, pendant son procès et face à la mort, ne semblent pas du tout propres d’un fou. En outre, cette prétention de Jésus à la divinité est confirmée par ses multiples miracles (il a guéri de nombreux malades, ressuscité plusieurs morts, multiplié des pains et des poissons, marché sur les eaux, calmé des tempêtes, prophétisé la destruction du Temple, la trahison de Judas et les négations de Pierre, etc.), et notamment par sa propre résurrection : Dieu n’aurait jamais ressuscité un « illuminé », un menteur.

7. Ne serait-il pas bien plus facile de croire en la résurrection et la divinité de Jésus si, après la résurrection, il s’était manifesté dans toute sa gloire aux multitudes ?

Jésus ne veut pas forcer notre foi. Il respecte notre dignité de créatures libres. Par conséquent, il ne nous assène pas des preuves incontestables qui obligeraient notre intelligence à s’incliner. Le Seigneur veut susciter notre amour, qui ne peut que se donner en toute liberté. A ce propos, n’oublions pas les paroles de l’Ecriture : « tu crois qu’il n y a qu’un seul Dieu, et tu fais bien. Mais les démons aussi le croient et ils tremblent » (Jc 2, 19). Une adhésion imposée à la foi n’apporte pas le salut éternel : seule une adhésion pleine d’amour peut nous sauver. Cela ne signifie pas que notre foi en Jésus de Nazareth soit irrationnelle : nous venons de voir les nombreux motifs qui la rendent raisonnable.

8. Nous n’avons pas abordé la question de la crédibilité des sources sur la vie, la mort et la résurrection de Jésus. Les Evangiles peuvent-ils être considérés comme crédibles ?

A cette question on peut répondre : d’une part, la mise par écrit de la plupart des souvenirs de Jésus a eu lieu dans un laps de temps bref (d’après de nombreux historiens et exégètes, quelque trente ans), qui ne permettait pas la création de mythes, entre autres choses parce que beaucoup de témoins étaient encore en vie ; d’autre part, le milieu qui a donné origine aux récits évangéliques était constitué par des communautés dont les chefs étaient les intimes de Jésus. Ces chefs, témoins eux-mêmes de la vie de Jésus, garantissent l’historicité des souvenirs et la fidélité de leur mise par écrit.

9. Mais ce sont précisément ces chefs, les Apôtres, qui avaient le plus d’intérêt à manipuler la figure de Jésus…

Si l’on avait manipulé l’histoire, il serait très logique de penser que : 1) les manipulateurs en auraient profité pour faire concorder les paroles et les gestes de Jésus dans les quatre Évangiles ; 2) ils auraient aussi escamoté des souvenirs encombrants pour Jésus (le baptême de Jésus par Jean, qui peut faire penser que ce dernier est plus important que le premier ; l’affirmation de Jésus sur son ignorance à propos de la date de la fin du monde) ; 3) ils auraient ajouté dans la bouche de Jésus des enseignements de très grande importance pour orienter les premières pas de la vie de l’Eglise (par exemple, si les chrétiens devaient oui ou non suivre aussi la Loi de Moïse). 4) les propres Apôtres, auteurs de ces manipulations, auraient omis les souvenirs des négations de Pierre, de leur lâcheté, de leur manque de foi, de leur vanité, etc. Donc, si manipulation il y a eu, elle a été très maladroite.

10. Les Evangiles ont pu être manipulés au cours des siècles pour faire de l’homme Jésus un Dieu. Avons-nous des garanties de la fidélité des textes qui sont arrivés jusqu’à nos jours, par rapport aux textes rédigés au premier siècle ?

Les manuscrits des Évangiles que nous conservons nous montrent que nous pouvons accorder une grande fiabilité à la transmission de ces textes. D’abord en raison de la grande quantité de manuscrits que nous possédons. Alors que de l’Iliade nous avons de l’ordre de 700 manuscrits et des six premiers livres des Annales de Tacite, 1 seul, pour le Nouveau Testament, nous en disposons de quelque 5.400 en grec, la langue dans laquelle ils ont été rédigés (ici nous ne parlons pas de la possible version de Matthieu en araméen).

En outre, la distance qui sépare la date de composition des Évangiles et celle du manuscrit le plus ancien en notre possession est de l’ordre de 40 ans (pour un manuscrit de l’Évangile de saint Jean). Et nous avons des papyrus du 3ème siècle contenant une collection complète des quatre Évangiles. Et à partir du 4ème siècle, les témoignages sont innombrables. Par contre, il y a un intervalle de 1.900 ans entre les originaux des œuvres d’Homère et leurs premiers manuscrits conservés jusqu’à ce jour ; de 1.400 ou 1.300 ans pour d’autres classiques grecs (Eschyle, Thucydide, Démosthène, Platon, etc.) ; pour certaines œuvres de Jules César, la distance est de plus de 1.000 ans, etc.

11. Y a-t-il d’autres arguments qui confirment la crédibilité des Evangiles ?

Oui, plusieurs événements de la vie de Jésus racontés dans les Évangiles avaient été prophétisés dans l’Ancien Testament. Cela constitue un trait qui distingue l’histoire de Jésus de celle d’autres fondateurs de religions. Par exemple : son arrivée avait été annoncée dans une obscure prédiction en des temps reculés (cf. Gn 3, 14 ; Nb 24, 17). Plus tard, ont été mises par écrit plusieurs prophéties plus claires sur Jésus de Nazareth. Entre autres : sa naissance d’une vierge (cf. Is 7, 14) et de la descendance de David (cf. 2 S 7, 16) ; son entrée triomphale à Jérusalem (cf. Za 9, 9) ; quelques événements de sa passion (cf. Is 53, 2-12 ; Sg 2, 12-20 ; Ps 22) ; sa résurrection (cf. Ps 16, 9-11).

12. Nous sommes toujours avec des arguments bibliques. Il n’y a pas d’autres raisons qui viennent de milieux étrangers aux Ecritures ?

Depuis la moitié du 20ème siècle, on peut compter sur des sources plus nombreuses sur la période historique de Jésus. Sources écrites, comme les manuscrits de Qumram, les textes gnostiques de Nag Hammadi, la littérature juive de l’époque entre l’Ancien et le Nouveau Testament. On a fait aussi de nombreuses et importantes découvertes archéologiques en Palestine. Ces deux types de sources montrent un milieu juif culturel, social et religieux qui concorde très bien avec les récits évangéliques.

En outre, il ne faut pas oublier les reliques anciennes dont la validité est de plus en plus acceptée, notamment le linceul de Turin. On ne trouve pas d’explication humaine à l’impression de l’image du crucifié sur ce tissu, image qui par ailleurs s’accommode parfaitement avec ce que les Évangiles nous racontent de la passion de Jésus.

Pour en savoir davantage :

J. Grifone : Des évangiles à Jésus-Christ, Tempora, Perpignan 2007

– V. Messori : Hypothèses sur Jésus, Mame, Paris 1978

– J.-C. Petitfils : Jésus, Fayard, Paris 2011

– A. Léonard : Les raisons de croire, Fayard, Paris 1996

– J. Ratzinger-Benoît XVI : Jésus de Nazareth I, Flammarion, Paris 2007 ; Jésus de Nazareth II, Rocher-Parole et Silence, 2011

 

Emmanuel Cabello est prêtre, Docteur en Sciences de l’Education et en Théologie.