Le 11 septembre dernier, le pape Benoît XVI, dans un discours prononcé à Ancône, s’adressait aux fiancés. Il leur parle du temps de préparation au mariage, en évoquant la scène des noces de Cana.
Chers fiancés !
(…) Sous certains aspects, notre époque n’est pas facile, surtout pour vous, les jeunes. La table est dressée et offre de nombreux mets exquis, mais, comme dans l’épisode évangélique des noces de Cana, il semble que manque le vin de la fête. En particulier la difficulté de trouver un travail stable recouvre l’avenir d’un voile d’incertitude. Cette situation contribue à renvoyer le moment de prendre des décisions définitives, et influence de façon négative la croissance de la société, qui ne réussit pas à mettre pleinement en valeur la richesse d’énergies, de compétences et de créativité de votre génération.
Le vin de la fête manque également à une culture qui tend à se passer de critères moraux clairs : dans la désorientation, chacun est poussé à agir de façon individuelle et autonome, souvent dans les seules limites du présent. La fragmentation du tissu communautaire se reflète dans un relativisme qui porte atteinte aux valeurs essentielles ; les affinités de sensations, d’états d’âme et d’émotions semblent plus importantes que le partage d’un projet de vie. Les choix fondamentaux deviennent alors eux aussi fragiles, courant éternellement le risque d’être révoqués, ce qui est souvent considéré comme une expression de liberté, tandis qu’en réalité, cela en manifeste plutôt le manque. L’apparente exaltation du corps appartient également à une culture privée du vin de la fête, car en réalité, elle banalise la sexualité et tend à la faire vivre en dehors d’un contexte de communion de vie et d’amour.
Chers jeunes, n’ayez pas peur d’affronter ces défis ! Ne perdez jamais l’espérance. Soyez courageux, même dans les difficultés, en demeurant fermes dans la foi. Soyez certains qu’en toute circonstance, vous êtes aimés et protégés par l’amour de Dieu qui est notre force. Dieu est bon. C’est pourquoi il est important que la rencontre avec Dieu, surtout dans la prière personnelle et communautaire, soit permanente, fidèle, précisément comme l’est le chemin de votre amour : aimer Dieu et sentir qu’Il m’aime. Rien ne peut nous séparer de l’amour de Dieu ! De plus, soyez certains que l’Eglise aussi est proche de vous, vous soutient, ne cesse de vous regarder avec une grande confiance. Elle sait que vous avez soif de valeurs, des vraies valeurs, sur lesquelles il vaut la peine de construire votre maison ! La valeur de la foi, de la personne, de la famille, des relations humaines, de la justice. Ne vous découragez pas devant les manques qui semblent effacer la joie de la table de la vie. Aux noces de Cana, lorsque le vin vint à manquer, Marie invita les serviteurs à s’adresser à Jésus et leur donna une indication précise : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le » (Jn 2, 5). Conservez précieusement ces paroles, les dernières de Marie rapportées dans les Evangiles, presque son testament spirituel, et vous aurez toujours la joie de la fête : Jésus est le vin de la fête !
En tant que fiancés, vous vivez une période unique, qui ouvre à la merveille de la rencontre et fait découvrir la beauté d’exister et d’être précieux pour quelqu’un, de pouvoir vous dire mutuellement : tu es important pour moi. Vivez ce chemin de façon intense, graduelle et authentique. Ne renoncez pas à poursuivre un idéal élevé d’amour, de reflet et de témoignage de l’amour de Dieu ! Mais comment vivre cette étape de votre vie, témoigner de l’amour dans la communauté ? Je voudrais vous dire avant tout d’éviter de vous enfermer dans des relations intimistes, faussement rassurantes ; faites plutôt en sorte que votre relation devienne le levain d’une présence active et responsable dans la communauté. N’oubliez pas non plus que, pour être authentique, l’amour exige également un chemin de maturation : à partir de l’attraction initiale et de la sensation de se « sentir bien » avec l’autre, éduquez-vous à « aimer » l’autre, à « vouloir le bien » de l’autre. L’amour vit de gratuité, de sacrifice de soi, de pardon et de respect de l’autre.
Chers amis, chaque amour humain est signe de l’Amour éternel qui nous a créés, et dont la grâce sanctifie le choix d’un homme et d’une femme de se confier réciproquement leur vie dans le mariage. Vivez ce temps de fiançailles dans l’attente confiante de ce don, qui doit être accueilli en parcourant une route de connaissance, de respect, d’attentions que vous ne devez jamais perdre : ce n’est qu’à cette condition que le langage de l’amour prendra toute sa signification également au fil des années. Eduquez-vous également dès à présent à la liberté de la fidélité, qui conduit à prendre soin l’un de l’autre, jusqu’à vivre l’un pour l’autre. Préparez-vous à choisir avec conviction le « pour toujours » qui caractérise l’amour : l’indissolubilité, plus qu’une condition, est un don qui doit être désiré, demandé et vécu, au-delà de l’incertitude de toute situation humaine. Et ne pensez pas, selon une mentalité diffuse, que le concubinage soit une garantie pour l’avenir. Brûler les étapes finit par « brûler » l’amour, qui a besoin au contraire de respecter les temps et les différentes étapes de ses expressions ; il a besoin de laisser un espace au Christ, qui est capable de rendre un amour humain fidèle, heureux et indissoluble. La fidélité et la continuité de votre amour vous rendront capables également d’être ouverts à la vie, d’être parents : la stabilité de votre union dans le sacrement du mariage permettra aux enfants que Dieu voudra vous donner de grandir en ayant confiance dans la bonté de la vie. La fidélité, l’indissolubilité et la transmission de la vie sont les piliers de toute famille, le véritable bien commun, un patrimoine précieux pour toute la société. Dès à présent, fondez sur eux votre chemin vers le mariage et témoignez-en également auprès des jeunes de votre âge : il s’agit d’un service précieux ! Soyez reconnaissants à ceux qui, avec engagement, compétence et disponibilité, vous accompagnent dans votre formation : ce sont des signes de l’attention et du soin que la communauté chrétienne vous réserve. Vous n’êtes pas seuls : recherchez et accueillez avant tout la compagnie de l’Eglise.
Je voudrais revenir encore sur un point essentiel : l’expérience de l’amour possède en soi la tension vers Dieu. L’amour véritable promet l’infini ! Faites donc de votre temps de préparation au mariage un itinéraire de foi : redécouvrez pour votre vie de couple la place centrale de Jésus Christ et du chemin dans l’Eglise. Marie nous enseigne que le bien de chacun dépend de l’écoute docile de la parole de son Fils. Pour celui qui se fie à Lui, l’eau de la vie quotidienne se change en vin, le vin d’un amour qui rend la vie bonne, belle et féconde. En effet, Cana est l’annonce et l’anticipation du don du vin nouveau de l’Eucharistie, sacrifice et banquet dans lequel le Seigneur nous touche, nous renouvelle et nous transforme. Et ne perdez pas de vue l’importance vitale de cette rencontre. Que l’assemblée liturgique du dimanche vous trouve pleinement actifs : de l’Eucharistie jaillit le sens chrétien de l’existence et une nouvelle façon de vivre (cf. Exhortation apostolique post-synodale Sacramentum caritatis, nn. 72-73). Vous n’aurez alors pas peur d’assumer la responsabilité exigeante du choix conjugal ; vous ne craindrez pas d’entrer dans ce « grand mystère », dans lequel deux personnes deviennent une seule chair (cf. Ep 5, 31-32).
Très chers jeunes, je vous confie à la protection de saint Joseph et de la Très Sainte Vierge Marie ; en suivant l’invitation de la Vierge Mère — « Tout ce qu’il vous dira, faites-le » — le goût de la véritable fête ne vous manquera pas et vous saurez apporter le « vin » meilleur, celui que le Christ donne pour l’Eglise et pour le monde. Je voudrais vous dire que je suis moi aussi proche de vous et de tous ceux qui, comme vous, vivent ce chemin merveilleux d’amour. Je vous bénis de tout cœur !
Source: http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/speeches/2011/september/documents/hf_ben-xvi_spe_20110911_fidanzati-ancona_fr.html. Nous remercions l’abbé Jean Gottigny de nous avoir signalé ce texte.