Le théologien Joseph Ratzinger, devenu le pape Benoît XVI, a écrit et continue de publier beaucoup. On ne peut pas tout lire. Emmanuel Cabello, docteur en théologie, nous a fait une sélection de quelques textes d’une importance particulière. Ils illustrent trois grandes lignes de pensée du pape.
La recherche de la vérité
Une première préoccupation de Benoît XVI concerne l’ambition d’affirmer une vérité en matière de foi et de morale.
Il était habituel, jusqu’à la moitié du siècle passé, que l’enseignement des papes ne s’adresse qu’aux fidèles de l’Eglise catholique. Ces textes présupposaient la foi et partaient de celle-ci pour proposer de nouveaux développements.
Le magistère des derniers papes, notamment de Benoît XVI, a souvent un horizon différent. Il s’adresse explicitement ou implicitement à un public large, qui déborde les frontières de la catholicité pour aller vers d’autres chrétiens, vers les croyants d’autres religions, les personnes travaillées par les doutes, les agnostiques, les athées.
Dans ces circonstances, ce message ne peut pas partir de la foi mais de la seule base commune à toute l’humanité, à savoir la raison. C’est de cette façon que Benoît XVI s’adresse aux hommes et aux femmes de notre temps, de différents horizons religieux et culturels, pour les encourager à poursuivre le but qu’il considère nécessaire pour tous : chercher la vérité dans la vie personnelle et fonder la société sur la recherche du bien, de la justice.
Dans cette recherche de la vérité, le pape n’oublie pas de mentionner la science, qui nous offre une connaissance du monde qui nous entoure et de l’homme. Avec ses applications techniques, elle nous procure des bienfaits de grande valeur. Benoît XVI est bien conscient de cette réalité et la rappelle souvent dans ses enseignements. Mais, en même temps, il souligne aussi régulièrement que ces sciences ne peuvent pas donner de réponse aux questions fondamentales de l’existence humaine, comme : d’où venons nous ? Quel est le but de notre vie ? Y a-t-il un bien et un mal objectifs ? Y a-t-il quelque chose après la mort ?
Depuis que la modernité a décrété que la seule méthode de connaissance fiable est celle des sciences naturelles, la religion et l’éthique ont été reléguées au rang d’opinions subjectives, influencées par les goûts et les sentiments personnels.
Benoît XVI refuse cette autolimitation de la raison. Il la rejette en rappelant l’existence d’une loi morale naturelle universelle, et d’une conscience humaine capable de s’ouvrir tant à cette loi qu’à la vérité religieuse, si elle est cherchée avec droiture, et toujours avec l’aide de Dieu.
En marge des grands documents du pape, comme ses encycliques, on retrouve ces idées notamment dans les discours suivants, qui revêtent un intérêt tout particulier :
- Allocution à l’Université de Ratisbonne, 12-IX-2006
- Allocution à l’Université de la Sapienza, Rome, 17-I 2008
- Conférence au Collège des Bernardins, Paris, 12-IX-2008
A côté de ces textes, on peut signaler, parmi d’autres, trois discours plus brefs :
- Discours au Congrès international sur la loi morale naturelle, 12-II-2007
- Discours à l’Assemblée générale de l’Académie pontificale pour la vie, 24-II-2007
- Discours à la Curie romaine, 20-XII-2010 (partie finale)
Les grands principes qui doivent guider la société pluraliste
Comme on l’a dit, Benoît XVI est aussi préoccupé de trouver un fondement rationnel pour instaurer une véritable justice dans la société pluraliste.
Pour le pape, le système démocratique constitue une bonne base pour régler de nombreuses questions de la vie en société. Mais si l’on se limite à ce système, c’est la force du nombre qui déterminera ce qui constitue la justice et les droits fondamentaux de la personne humaine, avec le risque que la loi du plus fort l’emporte sur la vérité.
Qui ne connaît pas la trajectoire intellectuelle de Joseph Ratzinger pourrait penser qu’un théologien comme lui, et de surcroît un pape, étiqueté de « conservateur », profiterait de cette faiblesse de la démocratie pour lui imposer des principes provenant de la foi ou de la morale catholiques.
Loin d’agir ainsi, Benoît XVI en appellera encore à la loi naturelle et à son acceptation, moyennant un élargissement de la notion de rationalité. Cette dernière ne peut pas rester emprisonnée dans la cage ou le rationalisme scientiste l’a renfermée. Elle peut et doit s’ouvrir aux vérités philosophiques et aussi aux lumières des grandes traditions religieuses de l’humanité contenues dans cette loi naturelle :
Voici quelques textes très importants à ce propos :
- Discours à l’Assemblée Générale des Nations Unies, 18-IV 2008
- Discours aux membres du Parlement et de la British Society, Westminster, 17-IX-2010
- Discours devant le Bundestag, Berlin, 22-IX-2011
La vie de l’Eglise
Benoît XVI est aussi confronté à une période troublée de la vie de l’Eglise (sécularisation et abandon de la pratique religieuse, appels à réformer l’Eglise, interprétations différentes du Concile Vatican II). Sur tous ces points, le pape a eu aussi quelques interventions remarquables :
- Discours à la Curie romaine (partie finale), 22-XII-2005
- Lettre aux évêques de l’Eglise catholique, 10-III-2009
- Discours aux catholiques engagés, Fribourg-en-Brisgau, 25-IX-11
Emmanuel Cabello est prêtre, Docteur en Sciences de l’Education et en Théologie.
