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Les raisons de ne pas craindre l’Islam

28 juin 2011

A l’approche du dixième anniversaire des attentats du 11 septembre 2001, aux Etats-Unis, beaucoup de questions se posent encore sur l’islam. « Les raisons de ne pas craindre l’Islam » est le titre d’un livre de Samir Khalil Samir, un spécialiste égyptien de l’Orient chrétien et musulman.

 

 

Samir Khalil Samir est né en 1938 au Caire. Il est copte et jésuite. Il vit à Beyrouth où il enseigne à l’université Saint-Joseph. Il est également professeur à l’Institut pontifical oriental de Rome, après l’avoir été à l’université du Caire, à la Sophia University de Tokyo, à la Georgetown University de Washington, en Angleterre, en Autriche, à Hong Kong, aux Pays-Bas ou en Palestine. Fondateur du Cedrac (Centre de documentation et de recherches arabes chrétiennes), il est président de l’International Association for Christian Arabic Studies. Il est l’auteur d’une cinquantaine d’ouvrages et de plus de mille articles sur l’islam et l’Orient chrétien.

Le curriculum vitae de l’auteur en fait un spécialiste de la question. Son lieu de naissance et sa foi chrétienne en font aussi un observateur privilégié et, comme il le dit lui-même, « tel un pont unissant deux rives », car les Arabes chrétiens ne sont « pas égaux aux Occidentaux car arabes, ni aux musulmans car chrétiens » (pp. 219-220).

Son ouvrage est le fruit de longs entretiens avec deux journalistes, Giorgio Paolucci, de l’Avvenire, spécialiste de la présence de l’islam en Europe, et Camille Eid, journaliste libanais vivant en Italie. Le livre est composé de 110 questions et réponses, et quelques annexes comportant une brève chronologie de l’islam, quelques tables chiffrées sur la présence des musulmans en Europe et un glossaire.

Les réponses du professeur Samir Khalil Samir sont à la fois claires, pondérées et très bien documentées. Elles s’adressent au grand public. Parfois elles sont « politiquement incorrectes », mais toujours argumentées : l’auteur n’esquive pas les questions délicates ou difficiles.

Les premières questions s’attachent à nous faire connaître la personnalité de Mahomet et l’histoire de l’islam, éléments fondamentaux pour comprendre cette religion dans laquelle se reconnaissent actuellement un milliard deux cents millions de personnes.

Sont abordés ensuite toute une série de problèmes auxquels l’islam a été confronté depuis toujours et qui restent très actuels : la question de l’interprétation du Coran, l’autorité à l’intérieur de la communauté musulmane, la conception islamique des droits de l’homme, la question du statut de la femme, le problème de la liberté religieuse, la signification du jihad ou guerre sainte, le rapport avec la modernité et l’Occident. Cette partie est particulièrement instructive, car elle nous éclaire sur toute une série de problèmes dont nous n’avons souvent qu’une vision très approximative, voire naïve.

De l’avis de l’auteur, le problème central que pose l’islam est celui du lien inséparable entre religion, société et Etat. La religion détermine la loi civile et la vie privée. Le non musulman doit vivre en situation d’infériorité (toléré, à certaines conditions, s’il est chrétien ou juif ; obligé de se convertir s’il n’est pas croyant), et les droits de l’homme sont mesurés à l’aune de la sharia. Tant que ce problème persiste, la coexistence Occident-islam restera problématique.

Enfin, le livre aborde la question de la présence des musulmans en Europe et de leur cohabitation avec d’autres cultures. A titre d’exemple, je résumerai ici brièvement la vision que développe Samir Khalil Samir sur le problème très actuel de la cohabitation des cultures. Pour le jésuite égyptien, il y a comme trois modèles d’intégration : l’assimilation, le melting pot ou la société multiculturelle.

Le premier modèle, appliqué en France, connaît ses limites car « elle présuppose et exige une identification intégrale des citoyens avec l’Etat et la suppression de toute différence, ce qui dans les faits est impossible à réaliser et à contrôler » (p. 170).

Le melting pot correspond au modèle américain, qui a son mérite mais aussi ses travers, car des minorités bien intégrées deviennent progressivement des majorités qui remettent en question toute une série d’acquis de la société américaine.

La société multiculturelle ne trouve pas grâce aux yeux de notre auteur, car, pour lui, elle est une utopie, qui provient du relativisme culturel et juridique et favorise la constitution de ghettos. Elle pénalise principalement la culture chrétienne.

Samir Khalil Samir est partisan du modèle de « l’identité enrichie », une culture, une histoire, une identité de fond, capable d’intégrer les éléments valables d’autres cultures. « C’est pourquoi les flux migratoires et l’expansion des communautés musulmanes constituent un véritable et vertigineux défi pour les sociétés européennes, qui sont forcées de s’interroger sur la consistance de ce qui les constitue, de retrouver les idéaux et les raisons profondes qui les définissent comme collectivités, nations, communautés humaines » (p. 175).

Finalement, faut-il avoir peur de l’islam ? En tournant la dernière page de ce livre, chacun pourra se faire son idée. Mais dans tous les cas, il vaut la peine de mieux appréhender la réalité de cette religion, soit pour identifier certains dangers potentiels et mieux les cerner, soit pour exorciser les craintes nées des jugements sommaires.

Stéphane Seminckx est prêtre, docteur en médecine et en théologie.

Le livre du Père Samir Khalil Samir est en vente sur didoc shop : cliquez ici pour pouvoir le commander.